mardi 12 avril 2011

Rencontres à la BNF

Deux rencontres sont prévues à la Bibliothèque Nationale de France autour des Etats Unis et la Science Fiction.

Les portes de la perception (30 avril) : Norman Spinrad, Jacques Baudou. Modérateur : François Angelier
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Les auteurs de SF américains et la contre-culture en France (14 mai) : Gérard Klein, Stan Barets. Modérateur : Roger Musnik
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Rencontres projetées
SF et Post-Modernisme
La singularité

La présentation :

Les USA et l’expérience de la Science-Fiction
Présentation générale d’un projet d’une série de rencontres consacrées à la SF aux USA à la Bibliothèque nationale de France

Il est fréquent de dire qu’aux Etats-Unis les mythes de l’espace et de la Limite remplacent celui de l’histoire. La spécificité du roman américain est liée à cet inconscient particulier. Les œuvres qui donnent à la littérature américaine son épine dorsale sont autant de préalables à l’invention d’un monde fantasmé en même temps que colonisé. Elles sont sauvages et minutieuses autant que parodiques. Dans les Histoires extraordinaires d’Edgard Poe, dans Moby Dick, de Melville le regard est modelé par la science positive, hanté par un fantasme d’encyclopédisme, habité du pressentiment de l’irréel, de la folie, de l’abîme. Ces ingrédients, exacerbés plus tard dans l’œuvre d’un Lovecraft, modèlent l’imaginaire américain.

1. Contre-culture

Pour Norman Spinrad, la Science-Fiction assume depuis les années 60-70 l’héritage du transcendantalisme d’Emerson et de Thoreau et perpétue une forme de contestation sociale et métaphysique. Comme le mouvement Beat, la SF relate l’épopée de solitaires ou de marginaux dans les fissures d’un univers carcéral ; à son tour elle pousse les portes de la perception et se tourne vers de plus anciennes cultures. Parfois contre leur propre gré, des auteurs comme Philip K Dick ou Kurt Vonnegut deviennent, dans les années 70, des étendards de la contre-culture. Dans les années 80, William Gibson, père, avec le roman Neuromancien du genre « cyberpunk » se réclame de Kerouac, Ginsberg, et Burroughs.

La science fiction américaine a également nourri la contre-culture française des mêmes années. La traduction des auteurs phares de la SF américaine fournit ainsi des références que partagent de nombreux acteurs culturels (artistes, auteurs, critiques, etc.) de notre époque en France. Ainsi, Richard Pinhas, pionnier de la musique électronique est aussi un théoricien de la science-fiction. Son essai : Les larmes de Nietzsche. Essai sur Deleuze et la musique a d’ailleurs été préfacé par Maurice Dantec.

2. Post-modernisme

Le roman post-moderne américain n’a pas, comme le Nouveau Roman français, restreint le domaine de la narration, ni d’abord fait porter d’abord à la syntaxe de la phrase le poids de sa suspicion. La méfiance s’est exprimée par une prolifération. Au lieu d’abandonner l’artefact, on l’a multiplié, au lieu de se draper dans le langage, on a mis au carré son pouvoir d’illusion.

La Science-Fiction, de cette façon, occupe une place de choix dans le roman post-moderne américain. Elle dispose à sa guise de ce que la critique littéraire veut périmer : elle écrit ce qu’elle veut, comme elle veut du moment qu’elle est cohérente avec l’univers qu’elle installe, parle sans complexes du chaos, de la désorientation, du vide, de l’horreur… Aussi la métaphysique romanesque américaine en est-elle imbibée : Vonnegut en est un maître, Pynchon en utilise les outils, et pour conduire sa méditation sur le mal, Cormac MacCarthy choisit dans La route le décor d’un désert post-apocalyptique. Dans le roman de SF, « tout est signe »: l’auteur peut jouer avec les univers qu’il invente comme s’ils étaient des mots, déconstruire la fiction tout en demeurant fiction.

3. La singularité ?

La science-fiction manifeste enfin une propension très ancrée dans l’esprit américain à fantasmer et modeler librement de grands espaces vides. Pour Spinrad, « (…) l’Amérique (…) a depuis sa naissance été pour les peuples de la Terre un rêve d’avenir, une sorte de spéculation science-fictionnesque concrétisée ». La SF exprime quelque chose de l’optimiste technologique américain, de la confiance parfois effrayante dans le progrès. L’imaginaire des principaux acteurs de la Silicon Valley est pour une large part un imaginaire de Science-Fiction.

On s’intéressera particulièrement au transhumanisme que prône Raymond C. Kurzweil, dont les romans de Spinrad et surtout de William Gibson donnent un avant goût, et au thème de la Singularité, ce point de rupture de l’évolution popularisé par Vernor Vinge, consacrant l’avènement d’une intelligence collective en croissance exponentielle (on notera que Larry Page, co-fondateur de Google, est un des plus puissants soutiens de la Singularity University).




Et un autre article de présentation :
Quatre Très Grands Livres, un Labyrinthe qui cache un Enfer, un Jardin hanté par un lapin légendaire… La Bibliothèque Nationale à Tolbiac éveille vite des réminiscences de Science-Fiction.

De fait, la SF n’est plus en terra incognita à la BnF. Collecte d’abord. Clément Pieyre constitue depuis 2006 un fonds de manuscrits et d’archives destiné à faire référence, où Gérard Klein, Jean-Pierre Andrevon rejoignent Jules Verne et Villiers de l'Isle-Adam. Acquisitions ensuite : la bibliothèque d’étude de Tolbiac, le Haut-de-Jardin, fait peau neuve et les conservateurs s’abandonnent plus volontiers à ce club très ouvert des « mauvais genres » où se fréquentent en toute liberté la SF, le fantastique et le polar. Mauvais genres, soit dit-en passant, souvent issus de hautes lignées car les fondateurs de dynasties s’appellent Edgar Allan Poe ou Lord Dunsany.

L’année 2011 sera, à tous points de vue, une année faste. En partenariat avec la BnF, une exposition, Science et fiction, aventure croisée, se tient jusqu’en juillet à la Cité des Sciences de la Villette. De son côté, le labo BnF met à disposition du public des technologies « de rupture » : les prototypes de papier électronique et les interfaces de réalité augmentée font ainsi écho aux ouvrages de William Gibson disponibles en libre accès. Pour une institution comme la BnF concernée au premier chef par les évolutions des NTIC, la SF est plus qu’un genre littéraire ; c’est une « boîte à idées » qui l’accompagne dans la réflexion sociétale, anthropologique, philosophique que les bouleversements en cours l’invitent à mener.

Pour détailler le contenu de cette « boîte », plusieurs rencontres sont prévues. Les premières traiteront des liens qui unissent la science-fiction et la contre-culture aux Etats-Unis et en France dans les années 60 et 70. Laboratoire littéraire, artistique, outil de contestation sociale, terrain d'expérimentation métaphysique, la science-fiction outre-atlantique noue à cette époque des liens étroits avec les mouvements protestataires. La traduction française des maîtres américains provoque de son côté une secousse durable : il suffit pour s’en convaincre de rappeler l’influence exercée encore récemment par cette littérature sur le travail d’un écrivain comme Michel Houellebecq. Côté musique, Richard Pinhas, pionnier de la musique électronique est aussi un théoricien de la science-fiction. Son essai : Les larmes de Nietzsche. Essai sur Deleuze et la musique a d’ailleurs été préfacé par Maurice Dantec.

Le 30 avril 2011, la BnF recevra Norman Spinrad, auteur de Jack Barron et l’éternité, qui s’entretiendra avec Jacques Baudou et François Angelier de ses rapports avec la Beat Generation et en particulier avec William Burroughs qui exerça une forte influence sur lui. Le 14 mai 2011, Stan Barets et Roger Musnik Gérard Klein, auteur d’une œuvre importante (dont Les seigneurs de la guerre), et éditeur en France de Robert Heinlein, Philip K. Dick, Franck Herbert ou d’ailleurs… Norman Spinrad.

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