jeudi 10 janvier 2008

Un édito interessant de Eduardo Carletti dans Axxón 181

Classifications

Eduardo J. Carletti, rédacteur en chef de Axxón

La science fiction est-elle le fait d’écrire sur l’avenir et sur la science? Et la fiction spéculative consiste-t-elle en la spéculation sur n’importe quoi ou sur quelques formes établies et reconnues? La fantasy, est-ce ce qui ne peut pas arriver? La terreur a-t-elle le pouvoir de nous faire peur?

Qu’est-ce que je m’en fiche!

Je vous fais peur, n’est-ce pas ?

Je ne pense pas que je vais me mettre à élucider ces problèmes. Il n’y a pas plus agréable qu’un texte in classifiable et rien n’est plus stimulant que d’en recevoir et d’en publier un dans une revue qui apprécie les contenus sans leur donner des annotations. Et quand, ensuite, quelqu’un le lit dans cette revue qui indique des genres et des classifications dans son titre sans qu’on sache bien de quoi il s’agit.

Je crois qu’il importe peu de savoir si une oeuvre porte une étiquette, la question est de savoir si elle est bonne. Avec de l’imagination. Avec des idées. Qui te remuent les méninges... Il n’y a rien de plus beau que de LIRE QUELQUE CHOSE DE TEL et de se sentir ému, surpris, extasié, stimulé, inspiré....

Alors, pourquoi tant de gens s’efforcent et continuent à cataloguer, enfermer dans des cases, séparer, et, comme une conséquence, agglutiner ensemble certaines choses en en excluant d’autres ?

Ne me le demandez pas.

Regardons la classification que propose l’écrivain Margaret Atwood au sujet des fictions qui entrent dans le champ de la science fiction :

  • Elles peuvent explorer les conséquences de technologies nouvelles, en nous les montrant en plein fonctionnement. Nous avons toujours été doués pour dénicher des chats cachés dans des sacs et des génies enfermés dans des bouteilles, mais nous n’avons pas été doués pour nous occuper d’eux ensuite. Ces histoires, sous leurs formes les plus obscures, sont toutes des versions de L’apprenti sorcier : l’apprenti découvre comment faire produire du sel au moulin à sel magique, mais il ne sait pas l’arrêter.
  • Elles peuvent explorer les limites de ce que signifie être humain, en allant le plus loin possible.
  • Elles peuvent explorer la relation de l’homme à l’univers, une exploration qui nous entraîne parfois en direction de la religion, et qui peut se mélanger facilement avec la mythologie, une exploration qu’on ne peut mener à l’intérieur des conventions réalistes que dans des conversations ou des soliloques.
  • Elles peuvent explorer les changements de l’organisation sociale, en nous montrant comment cela serait vraiment si nous vivions suivant certaines règles. Nous trouvons là l’utopie et la dystopie, qui nous ont prouvé tant de fois que nous avons des idées bien meilleures pour faire de la vie un enfer que pour en faire un paradis. Pensons à l’histoire de XX° siècle, quand une paire de sociétés se sont risquées à tenter une utopie et ont abouti à vivre en enfer.
  • Elles peuvent explorer les royaumes de l’imagination et nous emmener vaillamment là où personne n’est allé avant nous. Voici le vaisseau du divertissant film Voyage fantastique, avec lequel Raquel Welch était miniaturisée et injectée dans le flux sanguin à bord d’un sous-marin.

Je ne sais pas. Cet auteur croit-elle que ses idées sont parfaitement valides et les seules possibles ?

Peut-être quelqu’un attend-il une analyse. En toute sincérité, je n’ai pas envie d’étudier cette liste et de chercher des exceptions. Ou de trouver les oublis et les exclus. Cela serait tomber dans un piège.

En vérité, je préfère qu’un auteur me surprenne en m’envoyant quelque chose d’inclassifiable. Je crois avec ferveur que déclassifier et se débarrasser des rigidités sera toujours un grand triomphe pour lui.

Et pour moi.

Et pour les lecteurs.

Eduardo J. Carletti, 7 janvier 2008

Adaptation française de Georges Bormand, 9 janvier 2008

Texte original: http://axxon.com.ar/rev/181/c-181edit.htm

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